Dans les conflits que nous traitons en médiation, les discussions tournent autour des échanges verbaux, de ce que l’un ou l’autre a dit et de ce qui a été tu. Mais l’écrit est aussi présent, souvent au-travers de mails ou SMS qui ont parfois mis le feu aux poudres.

“OK, je serai là à la réunion…”

“Papa disait ça aussi…”

“Je te l’avais dit…”

A l’écoute de ce qui fait difficulté pour certains médiés, nous nous interrogeons sur un élément conflictuel particulier qui n’existe qu’à l’écrit : les points de suspension.

Les points de suspension, sujets à interprétation

Qu’est-ce que les points de suspension ? Une omission ou une “ellipse” comme on dit en rhétorique ? Ou bien quelque chose qui ne dit pas son nom ? En fait, par construction, les points de suspension laissent le choix de leur interprétation.

Dans la plupart des cas, l’interlocuteur devine avec justesse ce qui n’est pas dit. Quand dans un mail on lit “ça fait un moment que je t’attends…”, le contexte aide à comprendre, tout comme la connaissance de la personne qui écrit.

Lorsqu’un proche vous écrit “je suis à bout…”, il / elle ne formule pas de demande d’aide et pourtant, cette ponctuation ouvre la possibilité pour celui qui reçoit le message de proposer son aide, un café “pour en parler”, en tout cas de manifester son soutien et marquer que la détresse a été entendue. Les points de suspension agissent alors comme comme un déclencheur d’empathie.

Mais qu’est-il réellement entendu à travers ces points de suspension ?

Du sous-entendu au malentendu

Cette forme de ponctuation a des aspects alléchants et nombre d’entre vous avez sans doute déjà éprouvé sa puissance dans une relation de séduction. Qui n’y a pas eu recours pour laisser entrevoir une attirance, attiser le suspens, susciter un désir ?

C’est la formule idoine pour “sous-entendre” un fait, un ressenti, un trop, un manque. En n’explicitant pas totalement son propos, la personne qui use de cette tournure active l’imaginaire de son interlocuteur. Et c’est là que potentiellement, tout peut déraper.

On a beau connaître et apprécier une personne, comment savoir ce qu’elle a voulu dire si elle ne le dit pas elle-même ? Du sous-entendu au malentendu, le cap est vite franchi puisque l’interlocuteur n’est plus à l’écoute de l’autre, il est légitimement dans l’interprétation, cherchant à donner du sens à ces trois petits points. L’ambiguïté a des avantages mais en étant synonyme d’absence de clarté, elle peut être source de tensions et in fine, de conflit.

Personne ne vous intentera de procès si vous avez recours aux points de suspension. Mais lorsque cette tentation se présente, interrogez-vous sur cette pratique : que cherchez-vous à sous-entendre et qui ne met de l’huile sur le feu. Point final.

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